Micro nouvelle : “Ma vocation”

 Depuis tout petit, j’étais ami avec les abeilles. Au début, je les aimais juste car je pouvais faire peur aux filles en les attrapant et en leurs montrant, sans jamais me faire piquer. Mais petit à petit, elles sont devenues mes camarades de jeux, je leur apportais les plus belles fleurs à butiner. Je me sentais bien en leur compagnie. Je rêvais d’exercer le même métier que mes parents : apiculteur (ou plutôt ‘happy-culteur”, comme j’aimais le nommer). Mais un jour, toutes mes belles illusions se sont envolées : je me suis fait piquer. Je me suis réveillé une heure plus tard aux urgences, j’étais allergique au venin d’abeilles. Je n’ai plus jamais revu une de mes amies. Puis, à l'adolescence, je me suis passionné pour les avions. J’ai découvert le plaisir de voler avec mon grand-père, ancien pilote de ligne. Ainsi, à 18 ans, j’ai décidé de devenir pilote de ligne. Mais ma malchance me suivait. Lors des tests finaux pour mon acceptation, on m’a annoncé que j’étais daltonien. Dépité, je suis parti en Amérique du Sud durant trois ans. Avec mes nouveaux amis, nous avons exploré la forêt amazonienne. C’était des instants magiques… jusqu’à ce que je sois mordu par un serpent extrêmement venimeux. Rapatrié en France de toute urgence, je n’ai plus jamais remis les pieds dans une forêt. Seul point positif de cette aventure, le serpent en question était une nouvelle espèce, dont on m'attribua la découverte. Je la baptisai “naja mellifera” en souvenir de ma passion première. Je ne savais plus où me tourner, comment trouver ma voie. Je ne pouvais ni devenir apiculteur, ni pilote, ni explorateur. Que faire de ma vie ?

Alors je suis devenu moi. Tout simplement. J’ai commencé par raconter ma malchance chronique dans un, puis deux, puis trois livres, avant de me tourner vers la fiction. Je suis devenu écrivain, et, malgré de légères plaques rouges quand je restais trop longtemps au contact du papier, plus rien ne m’a empêché de devenir moi-même.